Boule rouge, boule bleue

Shao était en boule sur le lit, comme à chaque jour, à attendre que sa mère revienne pendant que les serviteurs lui apprennaient à marcher sur deux jambes et non plus comme un animal. Ce qui demandait de la patience et du temps. Mais Idril y arrivait petit à petit. Le bébé lui se demandait si dormir pour passer les heures serait bien. Depuis l'épisode avec Reïna il était plutôt tranquille, ça en devenait inquiètant même.

Isil bâilla longuement. Elle aussi était étendue sur les draps de soie royaux. C'était le lit de leurs parents, et les deus bébés s'y prélassaient des heures durant pendant que leurs parents vaquaient à leurs occupations. Idril apprenait à devenir autonome tandis que Nolan vaquait à ses occupations (secrètes) de prochain souverain. Le roi n'en savait rien, on ne lui avait pas soufflé un mot. Bon, revenons à nos moutons, ou plutpot à nos deux petits Zafaras. Isil se roula un peu sur le dos puis ouvrit ses yeux. Deux grands yeux innocents et naïfs, qui s'ouvraient tous les jours sur le monde et apprenaient de nouvelles choses. Enfin, elle repéra son frère puis s'accroupit, frétilla son arrière train et plissa ses petits yeux, prête à lui sauter dessus. En jeu.

Shao, couché en chien de fusil, regardait dans le vide que quelqu'un vienne s'occuper d'eux comme leur mère faisait chaque matin en le réveillant pour les nettoyer et les nourrir. Devaient être trop occupés. Et puis ça ne pressait pas. Le bébé eut un soupir. Il attendrait c'était pas plus mal. Il jeta un coup d'oeil à Isil. Qu'elle n'essaie pas.

Ah, si, Idril avaient envie d'essayer. Un petit sourire se forma sur le visage de la petite et elle tortilla encore un peu son arrière-train pour trouver le bone position. Voilà. Elle s'élança sur son frère, toutes griffes dehors (pas bien ça XD) et lança un cri ravageur, plus amusé que vengeur. Elle enfouit sa tête contre le flanc chaud du Zafara bleu puis poussa des petits couinements amusés, eut une lancée d'adrénaline et s'agrippa à son frère et les fit se rouler en boule. Oh, ce qu'elle aimait jouer ! Se dépenser, attaquer, rire, sortir les griffes, jouer. Ils continuèrent à rouler en boule quelques secondes puis elle lança un petit cri amusé. Il allait voir de quoi elle était capable, cette petite teigne n'allait pas s'en dispenser.

Elle allait vraiment essayer? Shao tenait moins bien sur ses pattes qu'elle. Il tenta de s'éloigner mais elle était trop rapide. Il fut obligé de suivre le mouvement contre son gré pendant que elle, elle s'amusait cette folle!?! Une fois qu'elle cesa son manège il lui lança un regard des plus assassins avant de lui sauter dessus à son tour mais lui ne jouait pas. Il la mordit au bras le plus fort qu'il pouvait et la donna un coup de griffes à la joue avant de recule, le dos rond, le poil hérissé, feulant, la menaçant de recommencer.

Oh ! C'était pas drôle ! Décidément, Shao ne comprenait rien à rien ! Vexée, Isil se remit sur ses quatre pattes puis s'épousseta le poil. Elle avait une vilaine balafre à la joue (enfin, ce qui peut être vilain pour un bébé de deux mois, c'est à dire pas grand chose) et son bras lui faisait un peu mal. Elle hérissa aussi un peu le dos puis elle se mit à crachoter :

"- Awa grahaa, couina-t-elle."

Ce qui voulait dire littéralement "c'est pas du jeu !". Oui, Shao devait être de mauvais poil aujourd'hui. Ou bien particulièrement flemmard, diagnostica-t-elle. Elle feula puis regarda avec des yeux de défi son frère jumeau. Il voulait la bagarre ? Il l'aurait. Elle se jeta sur lui en criant, sans retenue. Une goutte de sang s'écrasa de son lit, s'échapant de la blessure de sa joue. Rien de bien grave, mais quand même..

Il ne voulait pas jouer! Du tout! Il voulait être tranquille! Et qu'on le laisse ainsi! Pas que cette bougre d'Isil vienne lui sauter dessus à tout bout de champ! Quand il bougeait il arrivait toujours quelque chose de mal! Alors s'il pouvait éviter ça, il se disait que le mieux était de rien faire, de laisser le temps filer, de rester dans un coin à laisser les autres à leurs jeux.

Elle en voulait encore? C'était pas demain la vieille qu'elle aurait le dessus aussi vite! Pendant qu,elle attérissait sur lui, il replia ses pattes arrières et les étira pour la projeter plus loin. Lui faire voir qu'il en avait rien à faire de jouer avec elle ou avec d'autres! Il voulait la paix! Shao tint ses griffes et ses dents prêtes à la blesser encore plus.

Il émit le rugissement le plus fort pour un bambin de son âge. Touches-moi pas!

Son rugissement était terrible. Pour peu, n'importe qui en aurait tremblé. Mais pas Isil. Pas sa soeur, jumelle par excellence. Dès qu'ils furent créés, dans la poche ventrale d'Idril, déjà ils se connaissaient et la Zafara rouge n'avait passé aucune journée de son existence sans son frère. Elle le connaissait mieux que quiconque, personne ne pouvait savoir ce qu'elle savait sur lui. Déjà en l'état de foetus ils étaient ensqemble, alors, c'est dire... Mais on passait aux choses sérieuses. La petite fit un sourire en coin, mais se trouva propulsée par la boule de poils bleue à l'autre côté du lit, à deux doigts de tomber. Elle se remit sur ses pattes, frétillante, puis courut de toutes ses forces vers son frère. Elle prit appui sur une de ses pattes puis se lança en avant pour se retrouver sur son dos. Là, elle lui assena de petits coups de griffe dans son dos en s'écriant :

"- Frrr grr frg !"

Ce qui voulait dire : "bien fait pour ta tronche !"

Il pensait avoir la tranquilité. Il ne l"aurait jamais? Srait-elle toujours là? À attendre qu'il soit tout près, pour encore et toujours sauter sur lui, sans fin? Depuis des mois ils avaient passé leur temps ensembles, même avant d'être nés ils se chamaillaient quand même.

Quand Isil recommença en lui sautant sur le dos, cette fois il ne fit rien, il la laissa faire. Ça servait à rien de se battre si elle ne le laissait pas tranquille même pour un moment. Shao, écrasé sur le lit, supporta les griffes de sa soeur sans broncher.

Oh ! Non ! C'était bête maintenant....... Il ne réagissait plus du tout ! Isil se renfrogna, cessa de griffer son frère et s'étendit à côté de lui. Elle n'était pas atiguée, mais n'avait rien d'autre à faire.

La boule de poils bleue fit quelques galipettes puis se mit en boule. Quelques secondes plus tard, elle cavalait déjà d'un bout à l'autre du lit. Quel besoin de bouger, quelle énergie, ce serait dit tout le monde. N'importe qui serait ébahi par cette petite et son besoin constant de s'agiter et de fabriquoter quelque bêtise. Mais Shao semblait las. Après deux mois d'existence, il semblait déjà avoir l'habitude du mouvement incessant de sa soeur, et s elaissait faire sans broncher par totues ses sottises infatiles. Enfin.. Infantiles... Façon de parler, elle avait quand même seulement 2 mois.

Il commençait à avoir l'habitude que sa soeur bouge partout et n'importe quand. Elle serait en forme plus tard. Elle serait bien en muscles et en énergie. Lui bah pour le moment ça lui importait peu. Tout ce qu'il voulait c'était dormir toute la journée. Jusqu'à présent il n'avait pas montré beaucoup d'enthousiasme.

Il regardait sa petite soeur cambrioler partout sur le lit avec un air las. Il eut même un soupir. Il seleva et rampa jusqu'à oreiller où il se roula en boule. Il ne la dérangerait pas.

Isil s'arrêta un moment pour observer son frère. Ca ne lui était jamais venu à l'esprit qu'un jour il refuserait en bloc de jouer avec elle. Là, il ne faisait même pas attention à sa soeur et ne pensait qu'à dormir. Oui, il ne pensait qu'à dormir, voilà tout ! La seule chose qui accaparait ses pensées c'était son oreiller. Bougonne, la petite Zafara rouge s'installa sur l'autre oreiller et essaya de s'endormir aussi. Nullement fatiguée, elle ne titn pas une minute et déjà elle gambadait partout en se roulant comme une dingue. Enfin, elle se campa devant son frère et dit de sa petite voix fluette, dans son langage encore de bébé :

"- waba agha fag ?"

ce qui voulait dire : "tu veux jouer avec moi ?" La petite avait déjà oublié toute sa colère envers son frère. Et oui, c'est aussi comme ça les bébés.

Leurs parents passaient eur temps entre leur prochains devoirs et leur enfants. Saho ne voyait pas le temps passer comme les autres, selon lui. Il était si long... si long... ah non Isil jouait encore... jamais capable de rester en place quand elle n'était pas fatiguée et encore... en dormant elle bougeait... non... non... il ne voulait pas jouer...

Shao se redressa assis, la fixant, un regard vide. Il fit non de la tête. Il n'avait pas la tête à ça depuis longtemps. Un simple non poli pour lui dire qu'il ne voulait pas jouer. Shao était triste depuis longtemps.

Isil se tourna. Ses oreilles se baissèrent, et sa joie semblait ternie. Elle était face au mur. Son frère avait-il donc un problème ? Se sentait-il mal ? Elle ne pouvait pas l'obliger à parler, ni à jouer. Juste, elle voulait rester aussi proche qu'elle l'était avec son frère, continuer à jouer et s'amuser en toute innocence. Elle voulait qu'ils continuent à être loyaux et sincères l'un envers l'autre. C'est un drôle de sentiment pour une petite de 2 mois. Mais il est existant, tout aussi bien pour elle que pour les grands-pères de quatre vingt ans. Mais elle sentait que cette époque était révolue. Isil se coucha, mit son museau sur ses pattes repliées, et soupira longuement. Très longuement.

Shao tourna le dos à Isil, tête baissée, queue molle, dos vouté. Quand il s'était montré joyeux la dernière fois, quelqu'un était devenu triste par sa faute. Reïna était devenue triste par sa faute. Cette pensée le hantait. Une larme s'écroula sur l'oreiller. C'était de sa faute si Reï était devenue triste.

Comment allait-elle maintenant? Allait-elle mieux que la dernière fois? Le pardonnerait-elle? Il eut un gémissement de peine.

Elle avait beau se creuser le cerveau, Isil ne voyait toujours pas pourquoi il était triste. C'est vrai. Depuis quand l'était-il ? Elle haussa un sourcil, cherchant aux confins de sa mémoire. Cela faisait... Depuis... Combien de temps ? Un mois, deux ? Elle ne savait pas comment dire. Pour elle, les jours se succédaient comme ça, sans ordre. Un jour avec un rayon de soleil était privilégié, bienheureux, langoureux et délicieux, un jour de pluie était un jour embêtant, ennueux, tellement triste. Les heures venaient les unes après les autres, sans vraiment de logique, pour elle. Un jour pouvait signifier une semaine comme une semaine pouvait signifier un jour. Elle se retourna vers son frère, une lueur d'interrogation dans le regard.

Deux longs mois qu'il était ainsi. Pour Shao, Soleil et Lune signifiaient un jour entier. Alors ça faisait vraiment longtemps. Pas un sourire depuis ce temps, pas un jeu, pas une envie de jouer. Juste un bébé presque amorphe qui vous regardait sans vraiment le faire. Quand on le soulevait il ne se débattait pas. Pas beaucoup d'appéttit non plus de sa part. Il buvait assez peu de lait et ce n'était pas très bon. Il était moins rond que sa soeur. Moins joufflu.

Maintenant Isil se rendait compte tant son frère avait changé. Depuis un temps.. Indéfinissable, il ne jouait plus, dormait à peine, restait las, à fixer le vide, les yeux vides, les pattes pendantes. Il ne faisait plus rien. Isil remarquait l'étendue de la situation. Était-elle donc la seule à s'en rendre compte ? Effarée, la petite s'approcha de son frère, horrifiée. Non pas par Shao, mais par son comportement égoïste et naïf... Elle se posta devant lui, le regarda dans les yeux. Oh... Shao... Ses pupilles imploraient : "s'il te plaît dis-moi. S'il te plaît raconte-moi ce que tu as sur le coeur. Je suis ta soeur, je dois savoir. Partage avec moi ta douleur, même si elle est sans fin."

Shao fut surpris de voir Isil se mettre devant lui, l'implorer en silence. L'implorer de tout lui dire. Le problème, il ne savait pas encore parler. Alors comment tout lui dire? Comment s'expliquer? Il garda le silence, après un instant à fixer Isil il baissa les yeux. Il gémit.

"A... a-ie..."

C'était tout cequ'il pouvait dire, pourun bébé de mois, pour des bébés de deux mois ils étaient assez précoces.

Ayant un lien si fort que personne ne pouvait le comprendre avec son frère, Isil le comprenait, en quelque sorte. Ce mot, "aie", signifiait beaucoup de choses. Il souffrait, ou avait fait souffrir quelqu'un. En tout cas, sa souffrance intérieure était telle qu'il ne faisait plus rien de ses journées et restait là, sans rien faire. La Zafara rouge en avait déjà appris mais elle ne savait pas encore tout. Elle se pencha encore un peu plus vers son frère et le regarda dans le blanc des yeux, l'implorant de continuer. Que ce soit par sons, par onomatopées. Elle voulait tant savoir ce qui attristait tellement son cher frère car, après tout, ils avaient des liens du sang et personne ne pouvait rompre ça. Personne.

Shao reregarda sa soeur. Il leva la patte et ouvrit la bouche pour pointer l'intérieur. Puis il fit mine de vomir, en suite il montra un point plus haut, comme si quelqu'un le tenait et il recommença.

"Ma... ma.... ie...."

Mamie. Mamie avait été après lui et il croyait que c'était sa faute tout ça.

Isil pencha la tête, fronça les sourcils. Qu'avait à voir mamie là-dedans ? Mamie Reïna, si douce, attachante ? Elle ne comprenait pas. Mais c'était vrai qu'elle n'étais pas présente lors du "drame". Elle gambadait gaiement dans un autre coin du jardin... Toutes les pièces du puzzle étaient là, mais impossible de les mettre ensemble. La petite essayait de toutes ses forces de comprendre. Peut-être que Shao avait fait quelque chose de mal ? Par rapport à Reïna ? Peut-être que c'était ça, en fait. Peut-être... La Zafara continuait de réfkéchir. Pour un bébé de deux mois, c'est assez difficile de laisser ses pensées concentrées sur un point et de ne pas les laisser vagabonder. Mais elle s'efforçait d'assembler toutes les pièces dans son adorable petite tête rouge.

Peut-être que c'était peine perdue d'avance.Le mieux était peut-être de ne rien dire. On ne le gronderait peut-être pas.

"Ma-ie... ma-a-e..."

Il espérait qu'elle finisse par comprendre ce qu'il voulait dire. Mamie malade. Malade par sa faute oui...

Le bébé s'éloigna un peu. Si Isil restait trop près elle serait malade elle aussi, par sa faute. Shao s'effondra comme une masse sur les draps, las mais las.

En y pensant, c'était vrai que Reï n'éclatait pas de forme ces derniers temps. Depuis leur premier matin ici, Isil s'en souvenait, maintenant, Mamie Reïna était très joyeuse et puis tout d'un coup, sans que la petite sache pourquoi, on l'avait emmenée en haut et on ne l'avait plus vue pendant une semaine. Ensuite, elle avait eu beaucoup de choses à faire et n'avait pas eu le temps de voir les jumeaux, donc piur eux c'était comme si elle ne quittait plus sa chambre. Après, elle fut réellement malade, pendant presque un mois, elle avait eu une fièvre de cheval et Mamie Arianca avait dû rester à son chevet presque 24/24. Maintenant, elle allait mieux, se rétablissait peu à peu. Elle se levait un peu le matin, somnolante, buvait un grand chocolat chaud, passait la journée dans la bibiliothèque à lire ou bien à assister Idril. Isil fut prise tout à coup de stupeur. Non.. Quand même pas... Ce n'était tout de même pas à cause de Shao que leur grand mère avait été malade ?!

Shao pensait jour et nuit que c'était de sa faute si Reïna n'était pas en forme. Ça le hantait jour et nuit. Il ne goutait pas à la vie comme sa soeur. Il laissait le temps passer sans rien faire. Il ne voyait presque plus sa grand-mère, il pensait qu'elle l'évitait. Shao voyait tout en gris, même sa fourrure en avait la teinte, signe de déprime.

Le bébé était à la veille de ne plus se nourrir, chaque fois il buvait toujours moins, ce n'était pas bon pour lui.